- Stèle mémorielle pour les cinq historiques du FLN sur l’île d’Aix .
- Dans l’attente de la collaboration des Algériens
Devoir de mémoire, le projet d’une stèle commémorative du passage des cinq historiques du FLN, à Aix, en Charente-Maritime, a toutes les chances d’aboutir.
C’est, en effet, dans la petite île d’Aix qu’est née l’idée de réaliser le projet d’une stèle mémorielle devant l’emplacement du fort Liédot, lieu de détention de Ben Bella, Khider, Lacheraf, Aït Ahmed et Boudiaf de 1959 à 1961. “Pour peu que les Algériens soient intéressés par le projet, une stèle mémorielle rappelant l’incarcération des cinq historiques du FLN, à fort Liédot, verra le jour”, expliquera Karim Trari, le président de l'association Bleedi-La Rochelle, qui fait partie du comité d'organisation du projet au même titre que l'Office du tourisme de Rochefort dont dépend l'île d'Aix, le sculpteur André Bénéteau et le réalisateur de l’excellent documentaire qui traite de cette période méconnue de l’histoire de la Révolution algérienne, Salah Laâdi.
Cette volonté de dépoussiérer un pan de l’histoire commune entre les deux pays est également celle du maire de l’île, Alain Burnet, et son adjoint Thierry Lauth, nous dira M. Trari. Un intérêt historique, mais pas seulement, puisque pareil projet, s’il venait à se concrétiser, boostera sûrement le tourisme dans la région avec des visites sur l’île pour découvrir l’histoire du séjour des cinq, dont deux défunts présidents algériens, Ben Bella et Boudiaf, à fort Liédot.
En ce sens, le projet prévoit une stèle en verre d’une hauteur de 2 mètres où seraient inscrits les noms de ces chefs historiques avec un défilement d’images en noir et blanc de leurs portraits respectifs, le tout sur un socle en pierre marbrée mentionnant le lieu de détention. La réflexion de ce travail artistique et sculptural a été confiée à André Bénéteau, un artiste de renom de la région, qui a suggéré cette réalisation, mariant ainsi le contemporain avec l’histoire dans la transparence du verre dans toute sa beauté, nous explique encore notre interlocuteur.
Un voyage dans le temps, dans lequel nous invite ce projet ambitieux qui est né suite aux échos favorables reçus par le documentaire de Salah Laddi, Dans l’ombre d’une guerre, relatant l’histoire du détournement de l’avion des chefs historiques du FLN en 1956 jusqu’à leur détention sous haute surveillance au fort Liédot.
L’histoire inédite du premier acte de piraterie internationale ayant concerné un avion civil de transport de voyageurs a été mis en scène par Salah Laâdi. Il révèle aussi l’embarras de Guy Mollet, alors en déplacement à Londres, d’endosser une décision prise par son secrétaire d’État à la Défense. Le 22 octobre 1956, Ben Bella, Khider, Lacheraf, Aït Ahmed et Boudiaf se trouvent à Rabat. Ils viennent d’échanger longuement avec le sultan Mohammed V et son fils, le prince Hassan, au sujet de la conférence de Tunis à laquelle ils doivent se rendre à l’invitation de Habib Bourguiba.
À l’aéroport, un changement de programme survient et les cinq ne voleront pas dans le même avion que le sultan du Maroc. Celui-ci prendra un vol spécial qui survolera l’Algérie et met à la disposition de ses invités un autre avion, un DC3 de la compagnie Air Atlas, à bord duquel se trouve également un malade devant être hospitalisé à Tunis. Le décollage accuse du retard puis, après un moment, l’avion atterrit aux Baléares, escale non prévue au programme. Les passagers ne s’inquiètent pas plus que cela. Lorsque l’avion redécolle, personne ne se doute que la décision a été prise par les autorités françaises, avec l’aval de Guy Mollet, d’intercepter leur avion en le faisant atterrir non pas à Tunis, mais à Alger.
À la tombée de la nuit, le DC3 se pose sur le tarmac de l’aéroport d’Alger. Les cinq dirigeants du FLN sont arrêtés et transférés en détention “spéciale” vers la prison parisienne de la Santé, puis vers le fort Liédot. Considéré comme des prisonniers de marque, les représentants du FLN n’ont cessé de communiquer avec leurs réseaux, et ce, malgré leur détention qui a marqué les esprits.
De mars 1959 à mai 1961, le fort Liédot sera une plateforme de négociations avec, pour interlocuteurs-visiteurs, une multitude d’avocats, chefs politiques, émissaires de pays frères à l’Algérie et même l’Élysée.
En tout cas, le projet qui attend d’être pris en collaboration avec les autorités algériennes “ne pourrait naître que s’il y a une volonté commune de part et d’autre des deux rives”, dira Alain Burnet, qui souhaite échanger et engager des pourparlers avec la chancellerie algérienne en France. S. O.
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